Madame la Ministre,
Les cheminots sont très largement engagés, depuis le 3 avril dernier, dans un conflit en faveur d’une autre réforme du ferroviaire garantissant un véritable Service Public de transport ferroviaire de voyageurs et de marchandises, ainsi que des droits de haut niveau pour de meilleures conditions de vie et de travail.
Les résultats de la « Vot’action » mise en place par les organisations syndicales représentatives au sein de la SNCF attestent, si besoin était, de la mobilisation massive des cheminots et de leur opposition à la réforme conduite conjointement par Gouvernement et patronat.
A la veille du vingt-cinquième jour de mobilisation des cheminots, la détermination ne faiblit pas.
Aussi convient-il de constater, Madame la Ministre, que des engagements clairs relatifs au financement du système ferroviaire, aux statuts de l’entreprise publique, aux moyens humains et matériels, au devenir du Fret ferroviaire et plus généralement aux droits des cheminots de la branche ferroviaire et du Groupe Public, doivent être pris par le Gouvernement. En effet, le passage d’un système dans lequel la présence de l’Etat était forte, notamment par des dispositions légales et réglementaires, à un désengagement complet et immédiat de l’autorité publique aggraverait la situation conflictuelle et accentuerait durablement une crise sociale déjà historique. Les échéances posées par le projet de Loi discuté par le Parlement démontre la particularité du contexte et impose un traitement spécifique.
Les réponses manquent encore aux nombreuses et légitimes attentes et interrogations des cheminots.
Le renvoi à d’ultérieures négociations d’entreprise et de branche n’est pas de nature à répondre aux aspirations des cheminots et le comportement du patronat, dans l’entreprise et au niveau de la branche, qui n’a pour seule ambition que de réduire les droits des salariés, n’est pas propre à dissiper les légitimes craintes.
En ce sens, nous recevons favorablement l’engagement pris par le Gouvernement, après les rencontres avec les organisations syndicales du 25 mai dernier, d’organiser rapidement une table-ronde tripartite. Celle-ci doit être, à notre sens, productive et propre à dégager formellement des engagements clairs.
Pour autant, ces tables-rondes ne doivent pas se limiter à de simples « concertations » dont l’Etat serait cette fois spectateur, ni même être circonscrites dans leur objet à la construction des stipulations de la Convention Collective Nationale du Ferroviaire ou celles des négociations du nouveau Pacte Social de l’entreprise.
Des sujets structurants devront donc inévitablement y être négociés, tels que :
• Le financement du système ferroviaire, le traitement de la dette, son impact sur les comptes de l’entreprise, les équilibres économiques et financiers, les coûts induits, sur les « contrats de performance » et sur les conséquences en matière d’emplois et de conditions de production ;
• L’identification des investissements projetés ;
• L’organisation juridique et organisationnelle de l’entreprise publique ;
• Les droits de tous les cheminots, contractuels et statutaires ;
• Une convention collective de la branche ferroviaire en dynamique avec le nouveau pacte ferroviaire ;
• La réaffirmation et le renforcement du régime spécial de retraite et de prévoyance.
En outre, afin de donner aux tables rondes à venir toutes les chances d’efficience, il nous apparaît indispensable qu’elles soient systématiquement précédées d’un envoi à l’ensemble des participants d’un document préparatoire reprenant les propositions concrètes du Gouvernement sur chaque thématique.
Si le Gouvernement escompte résoudre le conflit en cours, ce ne sera qu’à la double condition de présenter des propositions claires et exemptes de reculs sociaux aux cheminots et que celles-ci les satisfassent.
Dans l’attente de vous lire ou de vous rencontrer, nous vous prions de croire, madame la Ministre, en notre haute considération.